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Journée d'études "Les limites de l'humain et la phénoménologie"

Publié le 9 septembre 2015 Mis à jour le 13 mars 2018

Il s’agira lors de cette journée d’explorer et de faire communiquer diverses voix philosophiques, qui, tout en partant d’une perspective phénoménologique, ont fait de la question des limites de l’humain un objet d’étonnement et d’interrogation philosophique, prenant ainsi au sérieux les acquis scientifiques et les avancées technologiques, quitte à modifier l’entreprise phénoménologique de l’intérieur – que se soit pour y trouver les ressources de la relance de la phénoménologie, ou, au contraire, pour assumer de rompre avec elle.

Date(s)

le 4 décembre 2015

9h45-18h
Lieu(x)

Bâtiment Maurice Allais (G)

Université Université Paris Nanterre
Salle G305
Les avancées scientifiques caractéristiques du XXème siècle ont bouleversé les conceptions classiques des limites de l’humain, traditionnellement distingué du vivant animal ou de l’automate mécanique par un certain nombre de propriétés essentielles. En envisageant l’homme comme le fruit d’une histoire naturelle et contingente, des disciplines comme la biologie moléculaire, la primatologie, ou la paléoanthropologie semblent mettre en question l’idée d’une exception humaine ou d’un propre de l’homme qui le distinguerait du reste du vivant. En expliquant son comportement et son activité mentale par des processus de traitement d’informations implémentables dans des machines artificielles, les sciences cognitives semblent élargir à des objets matériels inorganiques les phénomènes d’intelligence, de pensée et de sens, qui faisaient la spécificité de l’esprit humain.
La démarche phénoménologique permet-elle de renouer avec l’expérience vécue de la différence entre conduites humaines, comportements animaux et processus automatiques, et d’expliciter la pré-compréhension de l’humain qui structure cette expérience, en dépit de découvertes scientifiques brouillant les frontières entre animal et homme comme entre intériorité psychique et extériorité physique ? S’il ne se laisse pas réduire au vivant ou au physiologique, l’animal humain se laisse-t-il pour autant décrire depuis le cadre d’une conscience transcendantale ou d’une ek-sistence ?

Et si les perspectives cognitives ne suffisent pas à rendre compte du fonctionnement de l’esprit, les catégories de subjectivité ou d’idéalité permettent-elles d’appréhender les modifications de l’environnement perceptif et cognitif par les machines contemporaines, et les nouvelles formes d’expériences et de sens auxquelles elles donnent lieu ? Loin de conduire à un quelconque réductionnisme, la question des limites de l’humain, qui se pose à travers les acquis scientifiques contemporains, mettrait donc la phénoménologie au défi de l’anthropogenèse : la discipline devrait réintégrer, dans une perspective génétique, la question anthropologique traditionnellement exclue de son champ d’investigation, car perçue par ses fondateurs comme un risque de dogmatisme et de relativisme, une retombée dans le naturalisme ou dans l’historicisme, incompatible avec le dégagement des conditions transcendantales de la conscience ou avec l’analyse des structures ontologiques de l’étant ouvert à l’être. L’entreprise phénoménologique peut-elle sortir indemne d’une telle méditation ?

Bien qu’elle anticipe déjà sur le sens de l’humain et reste tributaire de l’attitude naturelle, la description du processus d’hominisation, en dérivant l’espèce humaine du vivant, n’engage-t-elle pas aussi à comprendre comment cette visée de l’humanité et ce rapport au monde et à l’être, qui font l’objet de la phénoménologie, ont pu émerger dans l’histoire contingente de la vie ? Quand elles ne fonctionnent pas sur la base d’une conception biaisée de l’esprit, les recherches cognitives, en intégrant la subjectivité humaine dans un espace technologique d’interactions sémiotisées, n’invitent-t-elles pas surtout à reconnaître l’extériorisation technique comme constitutive de la production de sens, brouillant ainsi les limites entre l’empirique et le transcendantal ? La découverte de la dérivation animale de l’homme, comme celle de ses nouvelles formes de relations sensibles et signifiantes avec les machines, ne bouleversent-elles pas ainsi les oppositions conceptuelles à partir desquelles la phénoménologie s’est constituée ? La question des limites de l’humain ne met-elle pas plutôt la phénoménologie à l’épreuve de ses propres limites ?
 
PROGRAMME :


10h | Bernard STIEGLERPhilosophe, professeur associé à l'Université de Technologie de Compiègne, directeur de l'Institut de Recherche et d'Innovation (IRI - Centre Georges Pompidou)
« Exosomatisation et guerre économique dans le Gestell »

11h | Etienne BIMBENET | Maître de conférences en philosophie, Université Jean Moulin - Lyon 3.
« Quelle augmentation voulons-nous ? Les ressources normatives de la phénoménologie. »
 

12h | Grégori JEAN | Maître de conférences en philosophie, Université de Nice.
« L'inhumanité du vécu »
 

14h30 | Anne ALOMBERT  | Doctorante en philosophie, Laboratoire IRePh, Université Université Paris Nanterre.
« Limites de l'humain : limites de la phénoménologie ? »
 

15h30 | Jean-Hugues BARTHELEMY | Professeur de philosophie, directeur du Centre International des Etudes Simondoniennes (CIDES - Maison des Sciences de l'Homme, Paris Nord)
« Les limites de la phénoménologie et la question de l'humain »
 

16h30 | Discussion générale

Mis à jour le 13 mars 2018